Principes juridiques

Un rapport de l’ONU qui a été mal interprété

Publié le 25.04.2023, 17:26 (CEST)

Les Nations unies auraient récemment formulé une recommandation pour le moins perturbante concernant la vie sexuelle des mineurs. Le tollé créé sur les réseaux sociaux est toutefois injustifié.

À en croire des publications partagées en ligne, les Nations unies auraient appelé à dépénaliser les relations sexuelles entre mineurs et adultes. Ces affirmations, qui circulent sur les réseaux sociaux et sur divers blogs, trouveraient leur source dans un récent document publié sur l’un des sites de l’ONU. Cette supposée directive indigne de nombreux internautes, certains y voyant même une normalisation de la pédophilie. Mais est-elle vraie ?

Évaluation

Non. Le rapport en question ne prône nulle part la dépénalisation des relations sexuelles entre mineurs et adultes. Il met en lumière le fait que des personnes mineures n'ayant pas encore atteint leur majorité sexuelle devraient avoir le droit d’être sexuellement actives tant que le consentement est mutuel, sans que cela ne soit automatiquement criminalisé.

Faits

Le rapport pointé du doigt par certains internautes date du 8 mars 2023. Il a été publié par la Commission internationale de juristes (CIJ), en collaboration avec le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme (HCDH) et l'ONUSIDA, le programme de l’ONU pour lutter contre le VIH et le sida.

Le texte rassemble une série de principes dits du 8 mars, qui ont pour but selon l’ONUSIDA et la CIJ de définir « une approche fondée sur les droits humains pour les lois criminalisant », entre autres, certains comportements en matière de sexe. D’autres points abordent également la consommation de drogues, le VIH, ou encore les problématiques liées à la pauvreté.

L'objectif de ces principes juridiques est d'aider les tribunaux du monde entier à limiter l'impact de lois violant les droits humains, notamment celles fondées « sur des motifs tels que le genre ou l’orientation sexuelle ».

Relations consenties entre mineurs

Contrairement à ce qui est avancé sur les réseaux sociaux, le rapport n’appelle pas à dépénaliser les relations sexuelles entre adultes et mineurs. La partie jugée incriminante est le principe 16, qui porte sur les comportements sexuels consensuels.

Le rapport soutient que toute criminalisation de relations sexuelles entre des mineurs n’ayant pas encore atteint la majorité sexuelle – un âge qui varie selon la loi en vigueur dans chaque pays – devrait prendre en compte la capacité de consentement de ces derniers, en fonction notamment de leur maturité.

À aucun moment le texte ne prône la normalisation des relations sexuelles entre personnes mineures et adultes. Les mauvaises interprétations dont le rapport a fait l’objet ont d’ailleurs poussé la CIJ et l’ONU à réagir.

« Les Principes du 8 mars n'appellent pas à la dépénalisation des relations sexuelles avec des enfants, ni à l'abolition d'un âge minimum de consentement aux relations sexuelles prescrit au niveau national », a souligné la CIJ dans un communiqué publié le 20 avril 2023. Celle-ci insiste au contraire sur le fait que « les États ont une obligation claire en vertu du droit international de protéger les enfants contre toutes les formes d'abus, tels que les abus sexuels, y compris par la criminalisation de tels comportements ».

Un démenti similaire avait également été formulé deux jours plus tôt par le porte-parole du Secrétaire général de l’ONU. La position du rapport à ce sujet, clarifiait-il, est qu’il n’est pas toujours approprié de recourir à des sanctions pénales à l’encontre d’adolescents n’ayant pas encore atteint leur majorité sexuelle ; dans le cas où il s’agit d’adolescents d'âge similaire entretenant des relations sexuelles consentantes, et qui ne s’inscrivent pas dans un cadre de domination ou d’exploitation.

Le rapport soutient en effet que les personnes de moins de 18 ans devraient pouvoir participer aux décisions qui les concernent, tant que la notion de consentement reste intacte. Un principe qui n’a rien à voir avec les fausses idées véhiculées sur les réseaux sociaux.

(Situation au 25.04.2023)

Liens

Publications Facebook I, II et III (versions archivées I, II et III)

Article trompeur (version archivée)

Rapport sur les principes du 8 mars (version archivée)

À propos la CIJ (version archivée)

À propos du HCDH (version archivée)

À propos de l'ONUSIDA (version archivée)

Communiqué de l'ONUSIDA sur le rapport (version archivée)

Communiqué de la CIJ sur le rapport (version archivée)

Majorité sexuelle en Suisse (version archivée)

Démenti de la CIJ (version archivée)

Démenti du porte-parole du Secrétaire général de l'ONU (version archivée)

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