Enfants et vaccination : une mauvaise utilisation des données de l'UE

22.02.2022, 13:52 (CET)

Les opposants à la vaccination utilisent volontiers la base de données de l'Agence européenne des médicaments (EMA) pour mettre en question les vaccins préventifs contre le Covid-19. Actuellement, des chiffres prétendument officiels circulent notamment sur les réseaux sociaux concernant des enfants qui auraient perdu la vie à cause de ces vaccins.

Évaluation

Ces chiffres sont faux. Ils ne correspondent en rien à la source citée. De plus, la base de données ne donne aucune information sur la causalité des effets secondaires avérés ou des décès.

Faits

Dans un post Facebook daté du 10 février 2022 du « European Forum for Vaccine Vigilance » (EFVV), on peut lire sur un sharepic, entre autres, ce qui suit : « Depuis le début de la vaccination, en Europe, ce sont 408 garçons et filles, agés de 0 à 17 ans qui sont décédés des suites de la vaccination contre la maladie dite Covid-19 ». Le post affirme également : « 186 sont morts d'une injection Janssen, 160 sont morts d'une injection Pfizer, 32 sont morts d'une injection Moderna, 30 sont morts d'une injection Astra-Zeneca ». La source citée est la base de données de l'EMA.

Il s'agit de la « Base de données européenne des rapports d'effets indésirables susceptibles d'être liés à l'utilisation de médicaments ». Cette base de données a pour but d'assurer la transparence sur les effets secondaires possibles des médicaments. Il ne s'agit pas d'effets secondaires avérés.

Dans un avertissement séparé concernant les chiffres sur les vaccins contre le Covid-19, il est explicitement dit ceci : « Les informations figurant sur ce site internet concernent les effets secondaires suspectés, c'est-à-dire les événements médicaux qui ont été observés après l'administration des vaccins COVID-19, mais qui ne sont pas nécessairement liés ou causés par le vaccin. Ces événements peuvent avoir été causés par une autre maladie ou être associés à un autre médicament pris par le patient en même temps. »

Seule une évaluation détaillée des données disponibles permet de tirer des conclusions fiables sur les bénéfices et les risques des vaccins Covid-19. En ce qui concerne les chiffres relatifs aux éventuels effets secondaires de la vaccination ayant une issue fatale, il est explicitement indiqué : « Ce site web ne fournit pas le nombre total de cas rapportés ayant une issue fatale. »

Ailleurs, pour comprendre les chiffres, on peut lire : « Les informations présentées sur ce site internet ne peuvent pas être utilisées pour déterminer la probabilité de ressentir un effet indésirable. »

Les chiffres partagés dans le post Facebook en se référant à la base de données sont incohérentes et incompréhensibles. Ainsi, il est dit que 186 enfants et adolescents âgés de 17 ans ou moins sont « morts d'une injection Janssen ». En réalité, le vaccin de Janssen n'est jusqu'à présent autorisé que pour les personnes de plus de 18 ans. C'est pourquoi la base de données de l'EMA ne fait état que d'un seul décès de moins de 18 ans pour les années 2021 et 2022 (jusqu'au 19/02/22). Le vaccin a été administré « à un patient appartenant au mauvais groupe d'âge », peut-on lire dans l'entrée correspondante.

Selon le post Facebook, 160 personnes seraient décédées à la suite d'un vaccin Pfizer. La base de données fait état de 69 décès pour Pfizer-BioNTech l'année dernière et de 99 cette année, soit 168 au total, qui pourraient théoriquement être liés au vaccin. 32 décès sont allégués dans ce post pour Moderna, mais la base de données ne contient en réalité que 14 entrées pour les années 2021 et 2022. Les 30 décès allégués suite à une vaccination avec AstraZeneca sont contrebalancés par 8 entrées dans la base de données pour 2021/22. 

Une analyse détaillée des entrées pour 2022 montre que sur les 99 personnes vaccinées par Pfizer, un patient a été victime d'un accident de la route et un autre a mis fin à ses jours. Surtout, cette évaluation aléatoire des 99 entrées de Pfizer-BioNTech, de cinq entrées de Moderna et de deux entrées d'AstraZeneca montre que sur ces 106 enregistrements au total, 78 contiennent tout de même des indications sur d'autres maladies graves et des maladies antérieures.

Pas moins de 22 fois, il est fait référence à d'« autres conditions médicales importantes » (Other Medically Important Condition/OMC). Dans les autres entrées, on trouve plusieurs références à des leucémies aiguës, à l'épilepsie, à la sclérose en plaques, au VIH, à différentes maladies métaboliques, à des maladies rénales, à des défauts génétiques, à des transplantations d'organes et à plusieurs cas d'amyotrophie spinale. Cela illustre à quel point la remarque de la base de données est importante et justifiée, à savoir que les chiffres ne disent rien sur les causes de décès sans un examen précis du cas individuel.

Dans le post Facebook, on peut lire en très petits caractères : « Pour une raison particulière, ce chiffre comprend aussi les décédés dont l'âge n'est pas spécifié ». En effet, pour une partie des enregistrements, l'âge n'a pas du tout été saisi dans un groupe d'âge, dans certains cas il a simplement été décrit comme « adulte » ou « enfant ». Dans cette partie de la base de données, on ne trouve aucun décès d'enfant chez AstraZeneca, six au total chez Moderna (cinq fœtus et un enfant mort-né), zéro chez Janssen et quatre fœtus chez Pfizer-BioNTech.

(État des lieux au 21/02/2022)

Liens

Post Facebook (version archivée)

Base de données de l'EMA (version archivée)

Avertissement de l'EMA (version archivée)

Données de l'EMA (version archivée)

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