Incendies de Los Angeles
La fausse piste des armes à énergie dirigée
Publié le 16.1.2025, 14:00 (CET)
Les gigantesques incendies qui embrasent Los Angeles et ses environs, depuis le 7 janvier 2025, ont laissé derrière eux des scènes de désolation.
Photos à l'appui, de nombreux internautes se demandent cependant pourquoi les arbres semblent intacts. « Un feu sélectif, qui pulvérise de la pierre et n'anéantit pas les arbres tout en faisant fondre le métal des jantes de voitures à distance des maisons, ça n'existe pas », écrit une utilisatrice de Facebook. « Il n'y a qu'une explication possible : l'utilisation d'arme à énergie dirigée », renchérit un autre, faisant allusion à des armes laser.
Cette théorie conspirationniste refait surface sur les réseaux sociaux à chaque incendie majeur. Pourtant, il existe une explication bien plus rationnelle.
Evaluation
L'affirmation selon laquelle les arbres ne brûlent pas est fausse, de nombreuses photos et vidéos le prouvent. Si certains arbres ont été épargnés, c'est en raison de caractéristiques propres ou d'autres facteurs comme le rôle du vent. De plus, les armes à énergie dirigée sont incapables de provoquer des incendies de cette ampleur, a affirmé un expert à la Deutsche Presse-Agentur (dpa).
Faits
Contrairement à ce qu'affirment les internautes, de nombreux arbres ont brûlé. Une multitude de photos le prouvent, comme ici, ici ou encore ici. Emblématiques de Los Angeles, les palmiers sont par exemple considérés comme particulièrement inflammables.
Si certains arbres ont survécu malgré tout, c'est en raison de caractéristiques propres. « Les arbres sont remplis de milliers de litres d'eau », expose Miranda Hart, professeure de biologie à l'Université de Colombie-Britannique, interrogée par CBC News. « S'il y a un arbre rempli d'eau et quelque chose de très sec à côté, c'est ce qui est sec qui va brûler en premier. Ainsi, le feu peut simplement faire le tour s'il y a suffisamment de combustible de chaque côté », précise-t-elle.
D'autres facteurs interviennent également, comme un changement rapide de vent qui peut rediriger les braises.
Armes à « énergie dirigée »
La théorie, infondée, selon laquelle ces incendies auraient été provoqués par des « armes à énergie dirigée » (energy directed weapon ou DEW, en anglais), comme des lasers, revient sur les réseaux sociaux à chaque incendie dévastateur.
Début août 2023, les feux qui avaient ravagé l'île de Maui sur l'archipel d'Hawaï, aux Etats-Unis, avaient déjà charrié de telles rumeurs. Quelques années plus tôt, en 2018, des allégations similaires avaient également circulé à propos du violent incendie qui avait frappé la ville californienne de Paradise.
Or, aucun élément avancé en ligne ne prouvait le recours à ces armes, comme l'a montré la dpa dans ce précédent fact-check.
En réalité, ces armes, qui existent bel bien, font l'objet de recherches dans plusieurs pays, dont les Etats-Unis. Appelées à compléter l'arsenal militaire à l'avenir, elles ne sont toutefois pas encore pleinement opérationnelles. « Les DEW en sont aux premiers stades de test pour une utilisation précise et localisée dans des contextes militaires, et non pour une destruction environnementale à grande échelle », explique Shawn Rostker, analyste pour le Center for Arms Control and Non-Proliferation, une ONG américaine dédiée à la réduction et à l'élimination des menaces posées par les armes nucléaires, chimiques et biologiques.
Des dégâts cohérents avec les feux provoqués par le vent
Depuis 2024, l'armée américaine a testé divers prototypes, principalement pour des missions de lutte contre les drones. Car c'est bien à cela que servent ces armes : détruire des systèmes électroniques à distance, pas provoquer des incendies de forêts.
« Pour déclencher des incendies de l'ampleur observée à Los Angeles, les DEW nécessiteraient des puissances massives et une infrastructure capable de diriger l'énergie sur de vastes zones, des capacités bien au-delà de ce qui existe aujourd'hui », ajoute Shawn Rostker.
Selon lui, les images virales prétendant montrer des « preuves » de l'utilisation d'un laser, comme des arbres non brûlés à proximité d'infrastructures détruites, s'expliquent facilement par le comportement de base du feu. « Les dégâts inégaux sont cohérents avec les incendies de forêt provoqués par le vent, le type de combustible et la proximité des structures, et non avec les frappes de précision d'un DEW », précise-t-il.
Un hiver particulièrement sec
A ce jour, l'enquête se poursuit sur les causes des incendies qui ravagent Los Angeles. Si celles-ci ne sont pas encore connues, les conditions météorologiques, elles, ont joué un rôle dans l'expansion rapide des flammes.
Alors que les pluies atteignent généralement un pic au mois de janvier, il n'avait pratiquement pas plu dans la région ces derniers mois. A cette situation, se sont ajoutés des vents particulièrement chauds et secs qui ont renforcé les incendies.
Selon les scientifiques, ces conditions sont rendues plus fréquentes avec le réchauffement climatique dû aux activités humaines.
(Situation au 16.1.2024)
Liens
Publications Facebook I, II, III (versions archivées I, II, III)
Photos d'arbres calcinés I, II, III (versions archivées I, II, III)
A propos du caractère inflammable des palmiers (version archivée)
A propos de Miranda Hart, professeure de biologie (version archivée)
Article de CBC News (version archivée)
Fact-check de la dpa sur les incendies à Maui
A propos des rumeurs similaires en 2018 - CBC News (version archivée)
A propos des DEW aux Etats-Unis (version archivée)
A propos du chercheur/analyste Shawn Rostker (version archivée)
A propos du Center for Arms Control and Non-proliferation (version archivée)
A propos du développement et des applications actuelles des DEW (version archivée)
A propos des conditions météorologiques - NBC News (version archivée)
À propos des fact-checks de la dpa
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