Pas d'explication unique

L'incidence des cancers en hausse déjà avant la pandémie

Publié le 13.11.2024, 16:25 (CET)

Les vaccins contre le Covid-19 pourraient-ils provoquer ou accélérer certains cancers ? Cette crainte est souvent partagée sur les réseaux sociaux. Mais elle n'est pas fondée scientifiquement.

C'est l'une des fausses croyances les plus tenaces sur les vaccins à ARN messager contre le Covid-19 : ces derniers seraient responsables d'une « augmentation notable de turbo-cancers », à en croire certains.

Cette affirmation a refait surface sur les réseaux sociaux fin octobre 2024 (par exemple ici, ici et ici), sur base d'une vidéo publiée sur Tiktok. Pourtant, cette idée ne repose sur aucune vérité scientifique.

Si le taux d'incidence des cancers augmente bel et bien ces dernières années, cette hausse serait plutôt due à nos modes de vie.

Evaluation

L'expression « turbo-cancer » ne repose sur aucune théorie validée scientifiquement et n'est pas reconnue par le monde médical. De plus, l'augmentation de l'incidence des cancers est une tendance qui était déjà observée avant la pandémie et le lancement des vaccins contre le Covid-19.

Faits

En août dernier, une jeune femme se présentant comme infirmière a publié une vidéo sur TikTok, dans laquelle elle dit constater une « augmentation inquiétante de cas de cancer » au sein de sa patientèle.

Ce témoignage, de nombreux internautes s'en sont fait l'écho, dénonçant un lien entre de prétendus « turbo-cancers » et la vaccination anti-Covid. Or, à aucun moment de la séquence, la jeune femme n'utilise l'expression « turbo-cancer », ni n'établit de corrélation avec les vaccins contre le Covid-19.

Elle le clarifie d'ailleurs dans une autre vidéo, dans laquelle elle précise, en réponse aux nombreux commentaires suggérant un lien avec les vaccins, ne pas pouvoir se prononcer sur les causes de ses observations.

Pas de signal d'alerte

Sur les réseaux sociaux, le spectre des « turbo-cancers » refait régulièrement surface. Selon cette théorie, apparue peu après les campagnes de vaccination généralisées contre le Covid-19, les vaccins à ARNm favoriseraient l'apparition ou l'accélération de cancers agressifs, notamment chez les jeunes.

A ce jour, aucune preuve scientifiquement étayée ne permet toutefois de confirmer cette hypothèse.

Le Dr Aspasia Georgala est cheffe du département des maladies infectieuses à l'Institut Jules Bordet, spécialisé dans le traitement des cancers, à Bruxelles. Sollicitée par la Deutsche Presse-Agentur (dpa), elle a creusé la littérature scientifique, mais n'y a rien trouvé de concluant à propos de prétendus « turbo-cancers ». « Aucune société médicale ne reconnaît cette expression, fabriquée pour soutenir des allégations fallacieuses », estime-t-elle.

De plus, « il n'est pas question d'explosion de cancers liés aux vaccins à ARNm. Rien n'a été constaté en ce sens ni en Belgique, ni en Europe, ni aux Etats-Unis », ajoute-t-elle.

En mars 2023, dans une tribune publiée dans le magazine L'Express, un collectif d'une cinquantaine de cancérologues avait déjà tenu à réfuter cette théorie, affirmant n'avoir connaissance à cette date d'aucun signal d'alerte concernant une incidence accrue ou un risque de progression rapide de cancer après la vaccination anti-Covid.

Une tendance marquée depuis plusieurs années

Si l'incidence des cancers augmente bel et bien, y compris chez les moins de 50 ans, cette tendance se dessine depuis plusieurs années.

« Globalement, il y a une augmentation de l'incidence des cancers, notamment chez les jeunes. Mais ce n'est pas depuis le Covid. C'était déjà avant. Donc, ce n'est pas depuis qu'il y a ce vaccin que la courbe se serait soudainement accentuée », explique le Dr Laurence Buisseret, cheffe du département d'oncologie à l'Institut Jules Bordet.

Selon une étude parue en 2023 dans la revue scientifique BMJ Oncology, ces 30 dernières années, le nombre de personnes de moins de 50 ans chez qui un cancer a été diagnostiqué a augmenté d'environ 80%.

Il n'y a pas d'explication unique à cette tendance. De nombreux facteurs sont mis en cause. « Il y a d'une part l'amélioration du dépistage, et d'autre part des facteurs comme la pollution de l'air et de l'eau, les pesticides dans les aliments, la sédentarité, le vieillissement de la population etc. », conclut le Dr Buisseret.

(Situation au 13.11.2024)

Liens

Publications Facebook I, II, III (versions archivées I, II, III, vidéo archivée)

Vidéo originale sur TikTok (version archivée)

Vidéo TikTok postée en réponse à la première (version archivée)

A propos du Dr Aspasia Georgala (version archivée)

A propos de l'Institut Jules Bordet (version archivée)

Tribune du collectif de cancérologues - L'Express (version archivée)

A propos de l'augmentation de l'incidence des cancers - The Conversation (version archivée)

A propos du Dr Laurence Buisseret (version archivée)

Etude publiée dans le BMJ Oncology (version archivée)

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