Vaccins anti-Covid valides

Une décision de la justice américaine qui a été déformée

Publié le 19.6.2024, 15:24 (CEST)

Contrairement à ce que certains affirment sur les réseaux sociaux, la justice américaine n'a pas estimé que les vaccins anti-Covid ne sont pas des vaccins classiques. Il s'agit d'une intox.

Une cour d'appel des Etats-Unis aurait jugé que les vaccins contre le Covid-19 ne peuvent pas être qualifiés comme tels, notamment car ils ne serviraient pas à prévenir la transmission de la maladie. C'est ce que relayent de nombreux internautes sur les réseaux sociaux, dont Facebook (ici et ici) et X, depuis le début du mois de juin. Mais le jugement en question a-t-il été bien compris ?

Evaluation

Non, la cour d'appel concernée n'a pas rendu de décision de la sorte. Elle a jugé valide une plainte sur la vaccination, un temps obligatoire pour le personnel d'une école de Californie, sans se prononcer sur la qualité des vaccins contre le Covid-19.

Faits

La Cour d'appel des Etats-Unis pour le neuvième circuit, qui couvre plusieurs districts de l'ouest du pays, a rendu une décision liée à la vaccination anti-Covid le 7 juin 2024. Celle-ci est cependant bien différente de ce qui est annoncé par les internautes.

L'affaire sur laquelle la Cour a statué a été intentée par des employés d'un établissement scolaire, la Los Angeles Unified School District (LAUSD). Ces salariés se sont opposés à l'obligation d'alors, pour le personnel de l'école, de se faire vacciner contre le Covid-19, affirmant que cela violait leurs droits constitutionnels.

L'affaire a été déboutée en première instance, le tribunal jugeant la plainte caduque car l'obligation vaccinale avait été entre-temps supprimée. Ce jugement a toutefois été annulé par la 9ème Cour d'appel (à la majorité de deux juges sur trois), qui a estimé que les plaignants pouvaient poursuivre leur démarche.

Aucune remise en question des vaccins

Mais, contrairement à ce que certains internautes affirment, la Cour n'a à aucun moment déclaré que les vaccins anti-Covid ne sont pas des vaccins. Les juges avaient pour mission d'établir si la requête des plaignants était recevable, sans rendre de jugement sur les arguments avancés par ces derniers au sujet des vaccins eux-mêmes.

C'est ce qu'a expliqué à la Deutsche Presse-Agentur (dpa) Lindsay Wiley, professeure de droit à l'Université de Los Angeles (UCLA), spécialisée dans les questions liées à la santé.

La Cour avait d'ailleurs prévenu qu'elle ne jugerait pas si les allégations des plaignants étaient vraies ou non, poursuit Lindsay Wiley. L'instance « n'a pas évalué les preuves scientifiques ni émis de conclusions sur les faits », souligne la professeure.

Pas de décision sur le fond

En première instance, les juges se sont appuyés sur une décision rendue en 1905 par la Cour suprême des Etats-Unis, dans l'affaire « Jacobson v. Massachusetts ». Ceux-ci avaient statué que la vaccination obligatoire contre la variole était légale car elle pouvait empêcher la propagation de la maladie.

Les plaignants ont avancé que, contrairement au vaccin contre la variole, ceux contre le Covid-19 n'empêchent pas, selon eux, la propagation de la maladie et se contentent d'atténuer les symptômes des personnes contaminées. Ils estiment donc que la décision de la Cour suprême ne s'applique pas dans ce cas. Les juges de la 9ème Cour d'appel leur ont donné raison en renvoyant l'affaire en première instance.

Cependant, l'affirmation des plaignants selon laquelle les vaccins anti-Covid ne seraient pas des vaccins, au sens de la définition médicale du terme, n'a pas été examinée par la Cour d'appel.

Pour statuer sur la recevabilité de la plainte, les juges ont écarté le fond : « A ce stade, nous devons accepter comme vraies les allégations des plaignants selon lesquelles le vaccin ne prévient pas la propagation du Covid-19 », ont-ils écrit.

Toutefois, ils précisent immédiatement après : « Nous notons le caractère préliminaire de notre décision. Nous ne préjugeons pas de savoir si, sur la base d'un dossier factuel plus poussé, les allégations des plaignants se révéleront justes. »

Dire que la 9ème Cour d'appel des Etats-Unis a jugé que les vaccins anti-Covid ne peuvent pas être qualifiés de la sorte est donc une grossière déformation de la décision rendue par les juges. Ces derniers n'ont pas statué sur la nature des vaccins.

Les vaccins jouent un rôle sur la transmission

L'efficacité des vaccins concernant la transmission du SARS-CoV-2, le virus qui cause la maladie Covid-19, n'a pas été immédiatement établie au moment de leur mise sur leur marché. Face à l'ampleur de la pandémie, l'objectif était tout d'abord d'élaborer des vaccins capables d'atténuer les formes graves de la maladie, et par conséquent de réduire le nombre de décès.

Bien qu'être vacciné contre le Covid-19 n'empêche pas forcément de contracter et de transmettre le virus, plusieurs études - dont quelques-unes sont reprises sur le site de l'Agence européenne des médicaments (EMA) - suggèrent que les vaccins permettent bel et bien de diminuer les risques de contamination.

En 2021 par exemple, une étude de l'Institut belge de la santé Sciensano a déterminé que les contaminations entre personnes entièrement vaccinées étaient réduites de 90%.

La vaccination a également démontré son efficacité pour freiner l'évolution des variants, comme l'a expliqué la dpa dans ce fact-check. D'autres organisations de fact-checking ont aussi consacré des articles à la question par le passé, notamment ici et ici.

(Situation au 19.06.2024)

Liens

Publications Facebook I et II (versions archivées I et II)

Publication X (version archivée)

Décision de la Cour d'appel (version archivée)

A propos de l'affaire - CalMatters (version archivée)

A propos de Lindsay Wiley (version archivée)

A propos de l'affaire « Jacobson v. Massachusetts » (version archivée)

A propos de la transmission du Covid-19 - EMA (version archivée)

Etude de Sciensano (version archivée)

Fact-check de la dpa

Fact-checks de l'AFP et Libération (versions archivées I et II)

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