Trop peu de pluie en hiver

Un risque de sécheresse avéré en France

Publié le 17.5.2023, 15:34 (CEST)

Une bonne partie de la France risque de manquer d'eau cet été. Difficile d'y croire lorsque des trombes d'eau s'abattent sur le territoire. Pourtant, la sécheresse est bien installée.

Sur les réseaux sociaux, de nombreux internautes contestent le risque de sécheresse déclaré notamment dans le nord de la France, à l'appui de photos, de cartes météo ou de vidéos d'épisodes pluvieux. Mais ces publications, largement relayées sur Facebook et Twitter, sont-elles fondées ? Les récentes averses suffisent-elles à écarter le risque de pénurie d'eau cet été ?

Évaluation

Ces affirmations sont trompeuses. Jusqu'à présent, les pluies printanières ont été insuffisantes pour combler le déficit de précipitations cet hiver et recharger les nappes phréatiques, qui constituent les réserves d'eau à long terme.

Faits

Alors que la France a subi une sécheresse qualifiée d'historique l'été dernier, les autorités craignent un scénario similaire cette année.

Fin avril, 47 départements étaient déjà en situation de vigilance, d'alerte ou de crise, soit davantage qu'en 2022 à la même période, lit-on notamment ici et ici.

Malgré sa météo réputée maussade, le nord du pays figure parmi les régions concernées. Le département du Nord, par exemple, est placé sous vigilance depuis le 14 avril dernier et l'était toujours à la mi-mai. La population y est priée de diminuer sa consommation d'eau.

La Région Île-de-France (qui comprend les départements 75, 77, 78, 91, 92, 93 et 94) est également touchée à des degrés divers, selon cette carte du ministère français de la Transition écologique.

Des pluies printanières abondantes mais peu efficaces

Pourtant, la pluie n'a pas complètement cessé de tomber. L'arrivée du printemps a coïncidé, en mars et avril, avec la succession d'épisodes pluvieux souvent abondants. Début mai, certaines régions ont également été copieusement arrosées, comme l'ont relevé nombre d'internautes, qui y voient une contradiction flagrante avec le discours officiel.

Mais contrairement à ce que certains laissent penser, ces averses ne sont pas incompatibles avec l'état de sécheresse. 

Si les pluies du début du printemps ont permis d'humidifier les sols, elles n'ont pas pu relever suffisamment le niveau des nappes souterraines, selon le service public d'information sur l'eau Eaufrance.

La préfecture du département du Nord l'explique également sur son site web, justifiant l'état de vigilance décrété depuis le mois d'avril. Après l'importante sécheresse de l'été 2022, « l’hiver 2022-2023 a été marqué par une pluviométrie inégale, et notamment une longue période sans pluie durant le mois de février. Cela n’a pas permis une bonne recharge des nappes d’eau souterraines (...). Les précipitations du mois de mars et du début du mois d’avril n’ont malheureusement pas permis de compenser cette situation ».

Sécheresse hydrologique

En France, c'est le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) qui est chargé de surveiller le niveau des nappes phréatiques.

Selon son dernier bilan, publié le 17 mai, « les précipitations de mars et d’avril ont engendré des épisodes de recharge bénéfique sur les secteurs arrosés (...) ». La situation s'est améliorée sur l'ouest du pays ainsi que sur la Région Grand Est. Ailleurs en revanche, « les pluies ont eu peu d’impact sur les tendances et l’état des nappes », souligne le BRGM.

Au 1er mai, 68% des niveaux des nappes étaient encore sous les normales mensuelles. Dans le nord du pays, les réserves affichaient globalement un niveau « modérément bas ».

En temps normal, ces réservoirs d'eau souterrains se remplissent lors des mois d'hiver, lorsque la végétation est au repos. Or la France a connu une saison hivernale particulièrement sèche.

Selon Météo France, les précipitations ont été déficitaires d’environ 25% en moyenne sur le pays et l'hiver 2023 se classe au 9e rang des moins arrosés depuis 1959.

Les précipitations sont donc arrivées un peu tard. Elles « ont d’abord permis d’humidifier les sols secs puis ont permis à la végétation de sortir de sa dormance avant de réussir à s’infiltrer en profondeur », précisait le BRGM dans son bilan publié au mois d'avril.

Comme l'explique également l'AFP dans ce fact-check, les averses de ces dernières semaines peuvent pallier la sécheresse météorologique - mesurée par la pluviométrie sur les trois derniers mois -, mais la sécheresse hydrologique - qui prend en compte les niveaux des nappes, les débits des cours d'eau et la réponse de la végétation à plus long terme - reste présente.

Selon le BRGM, les épisodes de recharge devraient rester ponctuels et peu intenses en mai, sauf événements pluviométriques exceptionnels. « L’évolution de la situation des nappes dépendra de leur réactivité, des cumuls pluviométriques locaux, de l’évapotranspiration et des demandes en eau », conclut-il.

(Situation au 17.05.2023)

Liens

Publications Facebook I, II, III (versions archivées I, II, III, vidéo archivée)

Publications Twitter I, II (versions archivées I, II)

A propos de la sécheresse historique en 2022 (version archivée)

A propos du risque de sécheresse en 2023 (version archivée)

A propos des 47 départements touchés I, II (versions archivées I, II)

A propos de l'état de vigilance dans le département du Nord I et II (versions archivées I, II)

Carte du ministère de la Transition écologique (version archivée)

A propos des précipitations abondantes du printemps I, II, III (versions archivées I, II, III)

Bulletin de la situation hydrologique - Eaufrance (version archivée)

Site web du BRGM (version archivée)

Bilan du BRGM publié en mai (version archivée)

A propos de la recharge des nappes phréatiques I, II (versions archivées I, II)

A propos de l'hiver très sec - Météo France (version archivée)

Bilan du BRGM publié en avril (version archivée)

Fact-check de l'AFP (version archivée)

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