Un tissu de mensonges sur la Russie et l’ONU

08.04.2022, 14:32 (CEST)

Un internaute affirme, sur Facebook, que « le président Russe Vladimir Poutine a approuvé l'abolition du Conseil de sécurité, de l'ONU, de la Cour internationale de justice, de l'Organisation mondiale de la santé et de toutes les organisations de défense des droits de l'homme affiliées aux Américains, comme il l'a décrit (sic). » (Version sauvegardée)

Évaluation

C’est un tissu de mensonges. D’une part, la Russie participe toujours aux délibérations du Conseil de sécurité des Nations unies. D’autre part, elle ne s’est jamais prononcée en faveur d’une dissolution de la Cour internationale de justice.

Faits

Le message a été publié le 29 mars aux Pays-Bas, en français. Sous le titre « Urgent, Poutine assomme l'ONU », il ajoute notamment que le président russe a ordonné « la fermeture de leurs bureaux et de leur siège (ndlr : des institutions internationales visées) en Russie et dans tous les pays du la Fédération de Russie. La confiscation des biens, du siège, y compris les bâtiments, les voitures, les lieux de divertissement, leurs clubs, leurs comptes dans les banques russes, ainsi que l'expulsion de leurs employés issus des pays de l'Union européenne. Ils ont jusqu'à 72 heures pour quitter le pays (sic) ».

Le texte est illustré d’une photo de Vladimir Poutine entouré de trois jeunes femmes, tout sourire. Elle date du 5 novembre 2019 et représente le président russe accueillant des représentantes des Brigades estudiantines russes.

De nombreux commentateurs de la publication ont tourné son auteur en dérision. À juste titre, car tout est faux, dans ce qu’il écrit.

Vladimir Poutine n’a jamais « approuvé l’abolition » de l’ONU ou de ses différents organes. C’est même le contraire - la mise à l’écart de la Russie de certaines institutions – qui se produit. Ainsi, l’Assemblée générale de l’ONU, composée des 193 pays membres de l’organisation internationale, a suspendu le 7 avril la Russie de son siège au Conseil des droits de l’Homme des Nations unies en raison de l’invasion de l’Ukraine. L’ONU ne reste pas les bras croisés, face à la guerre en Ukraine.

En attendant, la Russie participe toujours activement aux délibérations du Conseil de sécurité, le principal organe de l’ONU, dont elle est un « membre permanent », aux côtés des États-Unis, du Royaume-Uni, de la France et de la Chine. Elle y dispose d’un droit de véto sur les grandes décisions qui pourraient être prises en sa défaveur, ce qui explique qu’elle n’a, outre le pouvoir, aucun intérêt à l’abolir.

La preuve ? La représentation permanente (ambassade) de la Russie auprès de l’ONU est toujours très active, ce qui ne serait pas le cas si Vladimir Poutine avait réellement décidé de « l’abolition » de l’organisation internationale.

L’auteur du message mensonger sur Facebook commet par ailleurs une autre erreur grossière, en affirmant que Moscou « a approuvé l’abolition (…) de la Cour de justice internationale (CIJ) ».

La CIJ, basée à La Haye, aux Pays-Bas, est l’organe judiciaire principal de l’Organisation des Nations unies (ONU). Elle a été instituée en juin 1945 par la Charte des Nations unies et a entamé son activité en avril 1946.

La mission de la Cour est de régler, conformément au droit international, les différends d’ordre juridique qui lui sont soumis par les États et de donner des avis consultatifs sur les questions juridiques que peuvent lui poser les organes et les institutions spécialisées de l’Organisation des Nations unies autorisés à le faire, écrit-elle sur son site.

Le 23 mars 2022, la CIJ, dont le vice-président est russe, a publié une ordonnance sur des « allégations de génocide » avancées par l’Ukraine contre la Russie.

Le dépôt du mémoire de l’Ukraine a été fixé en septembre 2022, celui du contre-mémoire de la Russie en mars 2023. Moscou n’a pas encore indiqué s’il participerait à la procédure. Mais il n’a jamais dit que son intention était « d’abolir » la CIJ.

Peut-être l’auteur du message confond-il la Cour internationale de justice et la Cour pénale internationale (CPI), qui a annoncé en mars l’ouverture d’une enquête sur la situation en Ukraine, pour crimes de guerre et contre l’humanité.

Interrogé par la dpa, le porte-parole de la CPI, Fadi El Abdallah, souligne toutefois : « La CPI est une institution judiciaire permanente créée par un traité international, le statut de Rome, auquel la Russie n’est pas partie. » Vladimir Poutine ne pourrait donc pas décréter son « abolition ». 

(État des lieux au 08/04/2022)

Liens

Message Facebook (version archivée)

Photo Poutine (version archivée)

Suspension Russie (version archivée)

ONU Ukraine (version archivée)

Russie/Conseil de sécurité ONU (version archivée)

CIJ (version archivée)

Procédure CIJ (version archivée)

CPI (version archivée)

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