Macron ne peut pas jouer les prolongations

24.2.2022, 17:39 (CET)

« Vu que le virus bat de l’aile Macron organise une pseudo guerre avec Poutine pour prolonger son quinquennat et reporter les élections il veut faire de la république un empire comme son idole Napoléon. Je vous laisse méditer là-dessus (sic) », écrit un utilisateur belge de Facebook (version sauvegardée). Ce message a été publié le 21 février 2022, avant que les troupes russes pénètrent en Ukraine.

Évaluation

« C’est évidemment une fake news », déclare à la dpa Benjamin Morel, maître de conférences en droit public à l’Université Paris 2 Panthéon-Assas. Il n’est à ce jour pas question d’un report de l’élection présidentielle française, programmée en avril. De toute façon, la Constitution française encadre très étroitement cette possibilité, sans mentionner une « pseudo-guerre » qu’Emmanuel Macron n’a jamais voulu « organiser » – que du contraire.

Faits

L’élection présidentielle française, à deux tours, est programmée les 10 et 24 avril 2022. Le mandat d’Emmanuel Macron expire le 13 mai.

Rien n’indiquait, le 21 février, que le président de la République avait l’intention de « prolonger son quinquennat » et, partant, de reporter cette élection.

Ce n’était toujours pas le cas, deux jours plus tard, quand la dpa a interrogé le professeur Benjamin Morel, qui a renvoyé à une interview qu’il a accordée à « Public Sénat » le 23 décembre 2021, dans le contexte de la pandémie provoquée par le coronavirus.

En résumé, il expliquait alors qu’à moins de modifier la Constitution française – la procédure est lourde -, un report de longue durée de l’élection présidentielle française n’est pas envisageable, en raison de la crise du Covid-19. En 2017 déjà, un autre expert du droit électoral français, Romain Rambaud, avait abondé dans le même sens, dans un autre contexte, lié à la politique intérieure française.

La situation de « pseudo-guerre » dénoncée par l’auteur du message, sur Facebook, serait-elle susceptible de modifier la donne ? « Non. Cela ne change rien du tout », certifie Benjamin Morel auprès de la dpa.

La France, qui occupe actuellement la présidence tournante, semestrielle, de l’Union européenne, n’a de toute façon jamais voulu « organiser » une « pseudo-guerre » avec la Russie. Elle a toujours privilégié une solution diplomatique au conflit qui oppose la Russie à l’Ukraine.

Les communiqués de presse de l’Élysée, le siège de la présidence française, ne laissent planer aucun doute à ce sujet.

Le 20 février, à l’issue d’un entretien téléphonique entre Emmanuel Macron et le président russe, Vladimir Poutine, un communiqué indiquait : « Ils se sont accordés sur les points suivants : (…) La nécessité de privilégier une solution diplomatique à la crise actuelle et de tout faire pour y parvenir. Pour cela, un travail diplomatique intense sera mené dans les prochains jours et les prochaines semaines. »

Le 20 février toujours, autre communiqué, après des conversations téléphoniques avec Vladimir Poutine et le président des États-Unis, Joe Biden : « (…) Il a proposé qu’un sommet puisse se tenir entre le président Biden et le président Poutine, puis avec toutes les parties prenantes, sur la sécurité et la stabilité stratégique en Europe. Les présidents Biden et Poutine ont chacun accepté le principe d’un tel sommet. »

Le 21 février, après que Moscou eut reconnu l’indépendance des territoires indépendantistes ukrainiens du Donbass, l’Élysée a écrit : « Le président de la République condamne la décision prise par le président de la Fédération de Russie de reconnaître les régions séparatistes de l'est de l'Ukraine.

Il s’agit clairement d'une violation unilatérale des engagements internationaux de la Russie et d'une atteinte à la souveraineté de l'Ukraine.

Il demande une réunion d'urgence du Conseil de sécurité des Nations unies ainsi que l'adoption de sanctions européennes ciblées. »

Il s’agit bien de « sanctions ciblées », que les 27 États membres de l’UE ont formellement adoptées le 23 février. Des sanctions supplémentaires étaient attendues, dans la soirée du 24 février, après que les troupes russes ont envahi l’Ukraine.

(État des lieux au 24/02/2022)

Liens

Message Facebook (version archivée)

Benjamin Morel (version archivée)

Élection France (version archivée)

Report - Benjamin Morel (version archivée)

Report - Romain Rambaud (version archivée)

Constitution française (version archivée)

Communiqué 1 Élysée (version archivée)

Communiqué 2 Élysée (version archivée)

Communiqué 3 Élysée (version archivée)

Sanctions UE (version archivée)

Nouvelles sanctions (version archivée)

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